Les chemins de l'adoption

L'attente

Anne raconte son attente jusqu’à l’adoption en tant que candidate célibataire.

Elle m’a semblé être la phase la plus difficile du projet, marquée par 2 sentiments : le vide et l’angoisse.

L’agrément en poche, j’ai ressenti un grand vide, tiraillée entre le désir d’action et une sorte de paralysie. Le « pourquoi » du projet était très clair, beaucoup moins le « comment » et le « où ».

Et pourtant je sais désormais que cette phase de latence était primordiale. Elle a laissé le temps au projet de murir et aux hasards de la vie de s’en méler.

Si le choix de l’Afrique était clair, ce sont des rencontres et des évènements indépendants de mon projet, qui ont pointé mon doigt sur le Sénégal. Me serais-je tournée vers un pays d’où sortaient 7 à 15 enfants par an pour la France si ces personnes n’avaient pas allumé une mèche?

Il me semble que cette phase de latence, durant laquelle j’avais l’impression de ne pas réussir à faire débuter mon projet, n’a finalement pas été inutile.

Ce qui peut apparaître à un moment donné de notre projet , une perte de temps peut s’avérer constructif et déterminant pour sa poursuite.

Cette phase de latence s’est avérée également pour moi très angoissante. La rencontre de couples au dossier impeccable ne faisait qu’accentuer mes doutes sur la faisabilité de mener à terme mon projet, moi qui me lançait seule.

Et les doutes s’enracinaient encore plus à la lecture des chiffres et statistiques qu’il est incontournable de nous transmettre.

Mes angoisses n’ont pas concerné uniquement la faisabilité du projet. Elles ont également concerné l’éventuel futur apparentement que j’imaginais.

Ma plus grande crainte était qu’on me mette dans les bras un enfant pour lequel je ne ressentais rien. Ma raison me dictait que tout enfant a le droit à une famille et qu’un lien affectif se construit, qu’il n’est pas inné. Le décalage entre ma raison et mes craintes primaires était générateur d’une grande culpabilité.

Le regard que je porte maintenant sur ces quelques mois me conforte dans l’idée que chaque histoire est personnelle et que la force du désir et la détermination sont le moteur du projet, une part d’inconscience .

Ne jamais se décourager. S’ouvrir sur l’extérieur et en même temps garder des œillères pour ne pas se laisser envahir par le désespoir et le pessimisme. Il existe une part d’inconscience toutefois nécessaire à mener ce combat.

Enfin, c’est au cours de cette phase de latence que j’ai senti croitre le désir d’être accompagnée; le désir de garder le lien avec l’institution de l’adoption et de faire évoluer mon projet au travers d’une implication individuelle mais également collective, jusqu’à et après l’arrivée de l’enfant.

© Mazaud Diana